En Corée du Sud, des centaines de milliers de jeunes arrêtent de travailler, accablés par les mauvais salaires et la pression hiérarchique

jeunes en repos Corée du Sud

Beaucoup n’arrivent plus à supporter la pression, qu’elle vienne des salaires trop bas ou du regard des autres. On voit de plus en plus de jeunes lâcher prise, presque à bout de souffle. Cette situation prend tout le monde de court.

L’actualité locale intrigue même les observateurs les plus aguerris. Des milliers de jeunes diplômés quittent le marché du travail sans savoir s’ils y reviendront. Les familles tentent de comprendre ce qui se passe. Les entreprises s’inquiètent. Les institutions avancent à tâtons. Ce mouvement grandit chaque mois et laisse apparaître quelque chose de plus profond qu’un simple choix individuel. C’est un malaise silencieux qui commence enfin à se dire.

Corée du Sud : des jeunes au plus mal

Le pays voit apparaître une nouvelle catégorie sociale. Elle regroupe des jeunes diplômés qui, malgré un parcours scolaire solide, mettent leur carrière entre parenthèses sans date de retour. Les derniers chiffres font l’effet d’une claque. 736 000 jeunes entre 20 et 39 ans ont décidé de se mettre en repos, un statut un peu à part qui ne ressemble ni au chômage classique ni à une pause volontaire façon congé sabbatique. C’est autre chose. Une zone grise où l’on se retire parce que l’on n’a plus la force de continuer comme avant.

Le mouvement a pris de l’ampleur après la pandémie, comme si ce moment suspendu avait permis à beaucoup de réaliser qu’ils étaient déjà au bord du gouffre. Depuis, le phénomène dépasse largement la simple question de l’emploi. Il raconte un malaise plus profond, presque collectif.

Une grande partie de ces jeunes sort des prestigieuses universités de Séoul et avait jusqu’ici suivi la voie royale vers les grandes entreprises coréennes. Beaucoup racontent avoir quitté leur poste précédent avec un sentiment d’usure, parfois même de dégoût. Les salaires faibles, les remarques répétées, la pression hiérarchique ou l’ambiance de bureau étouffante reviennent dans chaque témoignage. Le système éducatif coréen, connu pour son niveau d’exigence extrême, a accentué leur fatigue. Ils ont étudié du matin au soir pendant des années, sans pause réelle. Une fois diplômés, ils espéraient une récompense à la hauteur de leur investissement. Ils ont trouvé l’inverse.

Une génération qui se met en retrait

Les spécialistes parlent d’une rébellion silencieuse. Personne ne descend dans la rue, mais beaucoup refusent d’entrer dans un système qui les a déjà vidés. L’idée de passer un entretien suffit à déclencher du stress chez certains. Un simple appel d’un recruteur provoque une boule au ventre chez d’autres. Ils préfèrent s’éloigner. Cette décision se prend souvent après un dernier poste vécu comme un échec ou un choc émotionnel. Une sorte de burn-out diffus qui marque un point de non-retour. Les familles vivent cette période avec frustration, mais aussi avec résignation, car personne ne veut risquer d’aggraver la situation.

Les jeunes en repos en Corée du Sud expriment un besoin de souffler, de retrouver un minimum de calme et de réfléchir à ce qu’ils veulent vraiment. Ils affirment ne pas être prêts à se réengager dans un environnement professionnel qui les a déjà abîmés. Certains se réfugient dans les jeux vidéo, d’autres dans les cours en ligne ou dans des activités bénévoles. On observe aussi un besoin croissant de solitude, presque protectrice. La société découvre une fracture générationnelle qui remet en question le modèle traditionnel basé sur l’effort sans limite et la réussite matérielle.

Un poids économique qui ne passe plus inaperçu

À l’échelle nationale, les chiffres interpellent. Le pays traverse un effondrement démographique historique, et cette vague de retrait affaiblit encore plus sa main-d’œuvre qualifiée. La Fédération des industries coréennes a tenté d’évaluer l’impact de cette absence prolongée. Elle estime que ces départs spontanés ont coûté plus de 44 000 milliards de wons entre 2019 et 2023, l’équivalent d’environ 27 milliards d’euros. Les grandes entreprises voient une partie de leurs futurs cadres disparaître. Les secteurs clés doivent réorganiser leurs équipes en urgence.

Le gouvernement s’alarme, car cette situation touche directement l’économie nationale. Les autorités veulent établir un contact individuel avec chaque personne inscrite dans ce statut particulier. L’objectif reste simple : les convaincre de revenir. Le ministère du Travail a lancé des programmes de réadaptation douce, entièrement virtuels, pour les initier à un retour progressif en entreprise. On y travaille la communication, la gestion des échanges, la collaboration d’équipe, le tout sans pression. Ces initiatives restent encore limitées. Les résultats se font attendre. La plupart des jeunes en repos en Corée du Sud ne se sentent pas prêts à reprendre le rythme traditionnel. Ils demandent un environnement plus humain, moins rigide et plus respectueux de leur équilibre. Les entreprises comprennent qu’elles jouent gros, car cette génération représente une main-d’œuvre stratégique.

Une fissure dans le modèle social

Le phénomène dépasse largement le monde du travail. Beaucoup y voient le symptôme d’une fracture profonde dans la société sud-coréenne. Le pacte entre les générations semble s’être affaibli. Les aînés ont grandi avec un modèle fondé sur l’effort continu, la discipline et la récompense matérielle. La nouvelle génération veut autre chose. Elle cherche du sens, de la stabilité intérieure, de la reconnaissance réelle. La quête dépasse la question du salaire. Elle concerne la manière de vivre, de se projeter, d’exister dans une société qui valorise encore la compétition permanente.

La pression scolaire a laissé des traces durables. Le pays découvre les limites d’un système qui avait porté sa croissance pendant des décennies. Les jeunes en repos en Corée du Sud incarnent ce changement de mentalité. Ils ne refusent pas le travail. Ils refusent les conditions dans lesquelles on leur demande de travailler. Cette nuance bouscule tout le modèle social du pays. Les débats explosent sur les réseaux, dans les familles et dans les amphithéâtres universitaires. Les sociologues observent une transformation culturelle inédite, presque comparable à une transition de société.

Un tournant qui façonne l’avenir

Cette vague de retrait tranche avec l’image habituelle d’un pays discipliné et tourné vers la performance. Elle agit comme un signal d’alarme. Le marché du travail doit évoluer. Les entreprises le comprennent. Certaines modifient déjà leurs méthodes managériales pour attirer à nouveau ces talents perdus. Elles revoient leurs exigences, réadaptent leurs horaires, améliorent leurs conditions d’embauche. L’économie coréenne vit un moment charnière.

Les jeunes en repos en Corée du Sud obligent le pays à repenser sa vision de la réussite. L’enjeu dépasse le court terme. Il touche au lien social, à la santé mentale, à la capacité d’un pays à se réinventer. Le futur dépendra de la façon dont les institutions répondront à cette remise en question collective. La société coréenne doit redéfinir ce qu’elle attend de sa jeunesse et ce qu’elle peut lui offrir. La situation inquiète les autorités, mais elle ouvre aussi une porte vers un nouveau modèle. Plus souple et plus humain. Plus ancré dans la réalité d’une génération qui refuse de s’épuiser pour entrer dans un moule qui ne lui correspond plus.

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