Selon la justice, le locataire qui dégrade un logement n’a rien à payer en fin de bail si son propriétaire oublie cette formalité

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Demander au locataire de payer les dégradations du logement semble logique pour beaucoup de propriétaires. Pourtant, à la fin du bail, la loi impose des règles strictes qui protègent le locataire en cas d’erreur ou d’oubli du bailleur. Un arrêt récent de la Cour de cassation rappelle d’ailleurs que la responsabilité du locataire ne peut être engagée sans une preuve valable et conforme aux procédures. Cette décision souligne les conséquences concrètes pour les deux parties.

Pourquoi l’état des lieux de sortie est-il si déterminant ?

Lors de la restitution des clés, un état des lieux de sortie doit être réalisé. Ce document, bien plus qu’une formalité, permet de comparer l’état du logement entre l’entrée et la sortie. C’est lui qui sert de preuve en cas de litige concernant d’éventuelles dégradations. Sans état des lieux contradictoire, il devient presque impossible de demander au locataire de payer des réparations.

L’état des lieux doit toujours être effectué en présence du locataire et du propriétaire (ou de leurs représentants). Si le locataire n’est pas invité officiellement ou si le bailleur réalise le document seul, il perd alors sa valeur devant un juge. Dans ce cas, la preuve des dégradations repose uniquement sur le propriétaire, qui a peu de chances de gagner une contestation.

Que rappelle l’arrêt de la Cour de cassation du 16 novembre 2023 ?

L’affaire concernait un état des lieux de sortie rédigé unilatéralement par l’agent du propriétaire. Ce dernier reprochait au locataire un mauvais entretien du jardin et voulait lui facturer les travaux. Cependant, il n’avait ni convoqué le locataire, ni fait appel à un commissaire de justice.

Il est important de préciser que l’entretien du logement reste une obligation pour les locataires du parc privé comme du parc social. Des manquements avérés peuvent même conduire à une procédure d’expulsion dans le secteur HLM.

La Cour de cassation a donc rappelé que sans convocation écrite (lettre recommandée) et sans recours à un commissaire en cas d’absence, l’état des lieux n’a aucune valeur. Le propriétaire a été condamné à rendre au locataire 1 539,60 €, somme correspondant au dépôt de garantie et aux pénalités de retard. Cette décision rappelle l’importance d’un strict respect de la procédure.

Quelles sont les obligations du propriétaire lors de l’état des lieux de sortie ?

Pour que l’état des lieux soit valable et ne soit pas annulé, le bailleur doit :

  • fixer une date et un horaire précis et informer le locataire par courrier recommandé ;

  • en cas d’absence ou de refus du locataire, mandater un commissaire de justice pour établir un état contradictoire.

Si le bailleur ne respecte pas ces étapes, il devra payer lui-même tous les frais liés aux dégradations, même si elles sont réelles. Un simple oubli peut donc coûter cher lors de la restitution du dépôt de garantie.

Les tribunaux sont également confrontés à des affaires où les propriétaires demandent réparation pour perte d’usage ou dégradations graves, notamment en cas de squat. Certaines décisions récentes montrent à quel point il peut être difficile d’obtenir une indemnisation lorsque la procédure n’est pas respectée.

Quels sont les impacts pour le locataire et le propriétaire ?

Dans l’affaire jugée, le locataire a récupéré 1 539,60 €, incluant le dépôt de garantie et les pénalités pour retard. Cette décision confirme que le locataire est pleinement protégé si la procédure n’est pas suivie ou si l’état des lieux de sortie est absent ou irrégulier.

Pour le propriétaire, les conséquences sont importantes :

  • aucune possibilité de réclamer les coûts de remise en état ;

  • obligation de restituer les sommes dues sans contestation possible.

Cette sévérité a pour but de garantir une relation plus équilibrée entre locataire et bailleur.

Comment éviter les frais à la charge du propriétaire en cas de contestation ?

Pour éviter tout litige, le bailleur doit toujours respecter les règles légales. Voici les étapes clés :

  • envoyer une convocation en recommandé pour fixer le rendez-vous ;

  • conserver toutes les preuves écrites (courriers, mails, accusés de réception) ;

  • appeler un commissaire de justice en cas d’absence du locataire ;

  • documenter les dégâts avec photos, vidéos et descriptions précises.

En suivant cette méthode rigoureuse, le propriétaire peut engager la responsabilité du locataire et demander réparation en cas de dégradations avérées.

Pourquoi la preuve de responsabilité repose-t-elle autant sur le formalisme ?

La Cour de cassation rappelle que sans preuve obtenue selon la procédure légale, aucune retenue sur le dépôt de garantie n’est autorisée. Le formalisme protège le locataire, mais il protège aussi le bailleur lorsqu’il respecte les règles.

Un état des lieux rédigé seul par le propriétaire n’a jamais de valeur. Seul un état des lieux contradictoire, ou réalisé par un commissaire de justice, permet de facturer des réparations au locataire lors de son départ.

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